Célébrer une femme née féministe


Marielle Esther (au centre) est l’une des dix femmes pivots qui représentent Fanm Deside dans le département du Sud-Est d’Haïti.

La Journée nationale du mouvement des femmes haïtiennes, célébrée le 3 avril, est une occasion importante pour notre partenaire Fanm Deside, dont la mission est d’œuvrer « au changement de la condition féminine haïtienne ».

Compte tenu de la violence politique actuelle et de la précarité de la démocratie, Fanm Deside a organisé cette année la célébration de la journée sous le thème Les femmes défendent le droit à la vie et la Constitution de 19871. Les activités menées en collaboration avec d’autres organisations de femmes incluaient des débats, des interviews, des émissions de radio et des visionnements de documentaires tels que Les Enfants du coup d’État.

Féliciter une féministe

Dans le cadre des célébrations, Fanm Deside a remis une plaque de félicitations à Marielle Esther en reconnaissance de ses services au mouvement des femmes. Madame Esther est le « point focal » de la programmation de Fanm Deside dans la commune de Bainet, dans le département du Sud-Est d’Haïti.

Cette mère de trois enfants, âgée de 39 ans, était une rebelle précoce. Au micro de l’émission de radio Action Féministe de Fanm Deside, elle a déclaré : « Je suis née féministe. Depuis ma plus jeune enfance, j’avais une conception différente de la réalité de mon pays, de l’éducation et des valeurs qui m’ont été transmises. Je m’opposais à tout ce qui été tâches ménagères ou toute autre attribution conférée aux filles. »

Les parents de Marielle Esther l’avaient inscrite dans une école éloignée, espérant qu’un trajet quotidien de 40 kilomètres à vélo ne lui laisserait pas de temps pour des « occupations non traditionnelles ». Cette stratégie s’est avérée inefficace car les occupations actuelles de Madame Esther sont plutôt non traditionnelles. Elle travaille comme technicienne en maçonnerie, en carrelage, en menuiserie, en plomberie et en fabrication de cercueils, autant de métiers dominés par les hommes.

Outre les encouragements et les louanges, Marielle Esther a dû faire face à de nombreuses discriminations sexistes, qu’elle a décrites comme un fardeau qu’elle porte depuis son enfance. Sans se décourager, elle a déclaré : « J’ai suivi mon chemin et j’ai fini par réussir au-delà des tabous et discriminations. »

Mener une stratégie axée sur les femmes

Madame Esther est l’une des dix femmes pivots, représentant Fanm Deside dans des communes souvent très éloignées de son siège social, situé à Jacmel, capitale départementale du Sud-Est.

Grâce notamment à un financement du ministère des Relations internationales et de la Francophonie du Québec, ces femmes sont formées pour identifier, accompagner et apporter un soutien social et parajuridique aux victimes de violences sexistes. Elles font également de la sensibilisation sur les droits des femmes, sur la COVID-19 et sur les mesures sanitaires et proposent des médiations dans les situations de conflits familiaux.

Pour expliquer l’accent mis sur les femmes, Mary Durran, chargée de programmes pour l’Amérique latine à Développement et Paix — Caritas Canada, a déclaré : « En Haïti, travailler avec les femmes est une priorité pour nous. Les femmes pauvres sont plus marginalisées et exclues que les hommes haïtiens. En plus de la pauvreté, elles subissent des violences basées sur le genre. Notre stratégie consiste à donner aux femmes les moyens d’agir pour améliorer leur situation, et à éduquer la société haïtienne sur la situation des femmes et sur la manière d’améliorer le respect de leurs droits. »

1) La Constitution de 1987, élaborée après la fin de la dynastie des Duvalier en 1986, visait à mettre fin aux pratiques dictatoriales du passé et à tourner une nouvelle page pour la démocratie et les droits de la personne.

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