Depuis le 13 octobre, une caravane de migrants, véritable marée humaine de plus de 7 000 enfants, femmes et hommes honduriens, tente de rallier à pied les États-Unis pour fuir leur pays gangréné par l’ultraviolence des gangs et la pauvreté.
Considéré comme l’un des pays les plus violents au monde, le Honduras, pays de 9,1 millions d’habitants affiche un taux de pauvreté de 64,3%, et près d’un habitant sur cinq vit en situation d’extrême pauvreté dans les zones rurales (moins de deux dollars par jour). De plus, le pays fait face à une crise politique qui remonte au coup d’État de 2009 où Manuel Zelaya, président élu du Parti libéral fut évincé. Les dernières élections en novembre 2017, qui ont déclaré vainqueur Juan Orlando, candidat de droite du Parti National ont été jugées hautement frauduleuses par les organisations internationales qui ont appelé à de nouvelles élections. Néanmoins, les États-Unis ont reconnu le nouveau gouvernement et ont été suivis par le Canada.
Face à cette situation, des organisations de la société civile dont notre partenaire, Fundación Eric/Radio Progreso, se mobilisent en solidarité avec toutes les personnes victimes de migration forcée tout en appelant à la fin de la dictature et au retour rapide de l’ordre constitutionnel. Lors de la caravane solidaire organisée le 26 octobre dernier, où des marcheurs des quatre coins du Honduras se dirigeaient en direction de Tegucigalpa, capitale du pays, le père Ismaël Moreno, plus connu sous le nom de père Mélo, directeur de Fundación Eric/Radio Progreso, déclarait que c’est le pouvoir politique qui chasse les gens du pays :
« C’est à Tegucigalpa que sont prises les décisions macabres, les décisions qui menacent la vie des gens. Dans l’immense majorité de la société hondurienne, les émigrés font partie des majorités qui subissent les conséquences de leurs décisions égoïstes dans la capitale de la République, au Congrès national et dans les couloirs de la maison présidentielle. Par conséquent, nous exprimons le rejet de ces décisions et, en particulier, nous ne reconnaissons ni la légalité ni la légitimité du régime actuel au Honduras. Nous allons dire au pouvoir central que nous ne sommes pas seulement contre les décisions qu’il prend et qui provoque l’exclusion de la population qui émigre aux États-Unis, mais nous voulons leur dire que nous ne les acceptons pas et que nous ne voulons pas d’eux à la tête de l’État hondurien. »
Le 20 octobre dernier, la Conférence épiscopale du Honduras se prononçait également sur les récents événements dans le pays :
« C’est une réalité scandaleuse, causée par la situation actuelle dans notre pays, obligeant une foule déterminée à laisser le peu qu’elle a, et à s’aventurer sans certitude sur la route de la migration vers les États-Unis, avec le désir d’atteindre la terre promise. Un « rêve américain », qui leur permettrait de résoudre leurs problèmes économiques et d’améliorer leurs conditions de vie et, dans de nombreux cas, leur garantit la sécurité physique tant attendue. »
« L’Église des pèlerins au Honduras reconnaît le droit humain de chaque personne à une vie digne et au développement personnel, familial et communautaire. L’État hondurien a le devoir de fournir à ses citoyens les moyens de subvenir à leurs besoins essentiels, tels qu’un travail décent, stable et bien rémunéré, l’accès à la santé, à l’éducation et au logement. Et lorsque ces conditions ne sont pas réunies, les gens sont obligés de vivre dans la fatalité. »
« Il est également nécessaire que les pays développés et les États-Unis cessent eux-mêmes de fomenter la xénophobie et de condamner les migrants en les désignant comme des fléaux criminels et sociaux. Il est très important qu’ils puissent revoir leurs politiques migratoires et reprennent la proposition humaniste du pape François dans son message de 2018 sur les migrations, à savoir qu’il est impératif : d’accueillir, de protéger, de promouvoir et d’intégrer les migrants et les réfugiés. »
Au Honduras, le programme de Développement et Paix – Caritas Canada s’attaque aux causes profondes de la pauvreté, de l’exclusion et de la violence qui poussent des familles entières à migrer. Le programme est centré sur l’accès aux ressources minières et le contrôle de celles-ci à travers un accompagnement des populations affectées dans leurs démarches pour exiger le respect de leurs droits et de leur terre.
L’organisme appuie notamment des organismes de défense des droits humains et de l’environnement qui subissent de fortes pressions et une criminalisation à outrance. Ces dernières années, de nombreuses personnes associées au programme de Développement et Paix au Honduras ont été tuées. Ces deux dernières années, par exemple, quatre jeunes participants à un programme de formation au leadership organisé par la Fundación Eric et financé par Développement et Paix ont été assassinés.
De plus, Développement et Paix, a lancé cet automne la campagne d’éducation et de mobilisation Partagez le chemin, en solidarité avec les 68,5 millions d’enfants, de femmes et d’hommes qui ont dû fuir leur foyer et appelle les Canadiennes et les Canadiens à marcher en solidarité avec les personnes victimes de migration forcée. L’organisme appelle également le gouvernement canadien à en faire plus pour s’attaquer aux causes profondes de la migration forcée, telles que celles observées au Honduras.