Un appel à la conscience collective canadienne

Par Kiegan Irish, animateur pour l’est et le nord de l’Ontario

Lors de l’événement co-organisé par l’animateur de Développement et Paix, Kiegan Irish (en haut à gauche), l’auteure Joan Kuyek a remis en question les présupposés courants quant au caractère indispensable de l’exploitation minière et a tracé un plan d’action pour la solidarité internationale. (Jeremy Milloy/Centre Providence)

En capitulant devant les intérêts de l’industrie minière, l’État canadien se rend complice de graves violations aux droits à la terre et aux droits environnementaux des Autochtones et des communautés appauvries des Amériques. Telle est la terrible leçon d’un événement que j’ai co-organisé pour Développement et Paix – Caritas Canada le 22 septembre dernier, à la bibliothèque publique Kingston Frontenac, à Kingston en Ontario.

Plus d’une cinquantaine de personnes de tout le Canada ont participé à Chains of Gold : Extraction, Repression, and Solidarity in Canada and Latin America (Des chaînes en or : Extraction, répression et solidarité au Canada et en Amérique latine), un webinaire trilingue (anglais, français et espagnol) co-organisé avec le Centre pour la paix, la justice et l’intégrité de la Création des Sœurs de la Providence.

Les panélistes étaient Donald Hernández, un avocat des droits de la personne qui dirige le CEHPRODEC, l’une de nos organisations partenaires au Honduras, et Joan Kuyek, une activiste reconnue, auteure de Unearthing Justice : How to Protect Your Community from the Mining Industry (Déterrer la justice : Comment protéger votre communauté de l’industrie minière). Leurs présentations respectives sont venues rappeler l’importance de notre campagne Les gens et la planète avant tout et les liens entre notre travail de plaidoyer au Canada et le travail de nos partenaires des pays du Sud.

Défendre les défenseuses et défenseurs

Donald Hernández a décrit l’accompagnement et l’aide juridique que le CEHPRODEC offre aux défenseurs de la terre qui résistent à l’industrie extractive. Ce travail est d’une importance cruciale dans un pays comme le Honduras, l’un des pays les plus dangereux pour les défenseurs de la terre et de l’environnement (ce rapport est en anglais).

Il a rappelé que les communautés rurales pauvres n’ont ni le temps ni les ressources pour obtenir de l’expertise sur les enjeux complexes que sont les lois minières, le droit foncier et les ententes de commerce international. C’est pourquoi CEHPRODEC les informe sur ces questions et sur leurs droits et protections juridiques.

Il ajoutait que même si on fonde beaucoup d’espoir sur le programme électoral progressiste du nouveau gouvernement hondurien, la répression des défenseurs de la terre se poursuit, et les structures juridiques demeurent désavantageuses pour les communautés autochtones. M. Hernández a rappelé la criminalisation et la persécution de Víctor Vásquez et de Sonia Pérez, dont les cas ont été mis en lumière par Développement et Paix.

Il a aussi dénoncé la disproportion ridicule entre les petites quantités de minerais que l’on extrait et les énormes quantités de déchets et de destructions laissées par l’industrie minière. Il a déploré les dommages sociaux et écologiques incalculables infligés par des compagnies minières sans scrupule, dont plusieurs sont canadiennes. À une question de l’auditoire demandant ce que les Honduriens pensent du Canada, M. Hernández a répondu : « Pour ceux et celles dont les terres ont été volées et empoisonnées par les compagnies minières, le Canada est synonyme d’industrie minière! »

Des idéologies indéfendables

Joan Kuyek a repris les propos d’Hernández sur la logique et la logistique de l’industrie minière. En examinant leurs fondements idéologiques, elle constate que l’industrie minière appelle « surcharge » tout ce qui n’est pas le minerai qu’elle convoite. Dans cette vision du monde, le roc, le sol, les plantes, les animaux et les écosystèmes entiers deviennent des déchets.

Les profits de l’industrie minière sont des bénéfices à court terme, obtenus en externalisant les terribles préjudices aux communautés, aux mineurs et à l’environnement, a expliqué Mme Kuyek. Elle a décrit comment l’industrie minière arrive à exercer un contrôle efficace sur les gouvernements et leurs politiques par ses activités de lobby, ses incitatifs financiers, et par la fabrication astucieuse de mythes. L’industrie minière se décrit elle-même comme un élément essentiel de la vie moderne, créatrice d’emplois, de technologies vertes, de progrès et de développement. L’État canadien reproduit ces mythes avec enthousiasme, ajoute Mme Kuyek.

Les activistes qui se mobilisent pour s’opposer à l’industrie minière doivent bien comprendre ce narratif, assure-t-elle. Et nous devons nous poser des questions difficiles. N’y a-t-il pas de moyens plus justes, plus durables, de répondre à nos besoins? Lorsqu’on prend en compte les coûts réels de l’industrie minière, est-ce qu’on peut encore appeler cela du développement?

Comment bâtir un avenir meilleur

M. Hernández et Mme Kuyek nous ont démontré que, face aux nouvelles velléités impériales de l’Occident riche, il est important de s’organiser pour lutter contre ces projets extractifs abusifs, en solidarité avec leurs victimes. Cela est en parfaite cohérence avec la mission que s’est donné Développement et Paix de trouver des solutions de rechange aux structures sociales, politiques et économiques injustes.

Pour démanteler ce que Joan Kuyek a appelé « les structures de pouvoir en Europe et en Amérique du Nord », nous devons transformer la société canadienne dans une vision de justice et de paix, éviter d’acheter notre confort aux dépens des pauvres et de la Terre, et faire en sorte que la transition énergétique pour assurer un climat vivable ne dépende pas de la voracité et du pouvoir destructeur de l’industrie minière.

Vous pouvez contribuer à cette campagne en signant et en partageant notre pétition pour exiger une loi de diligence raisonnable en matière de droits de la personne et d’environnement, afin de prévenir et de réparer les atteintes aux droits de la personne et à l’environnement commises par les entreprises canadiennes œuvrant à l’étranger. Vous pouvez aussi rencontrer votre député pour exercer davantage de pression. Contactez votre animatrice ou animateur local pour découvrir d’autres moyens de soutenir notre mouvement. Pensez aussi à faire un don pour appuyer le travail de première ligne d’organisations comme le CEHPRODEC.

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